Après la conférence de presse sur la situation sanitaire dans les îles du Nord, le préfet a été interrogé sur la crise qui secoue depuis plusieurs semaines la Collectivité. Celui-ci a exprimé son sentiment après qu’il ait lu le communiqué signé par trois syndicats. Voici dans son intégralité les propos du préfet Serge Gouteyron.
SMBN
« Je suis à la fois désemparé, inquiet, et en temps que préfet, atterré par celles et ceux qui, peut-être, sont descendants d’esclaves et qui peuvent avoir une approche de rejet des autres.
Ça me perturbe profondément. Là, c’est l’homme qui parle… Dans cette terre de Saint-Martin, qui a quand même été marquée, et où les comportements, que l’on peut constater aujourd’hui, pourraient être comparables, dans le rejet des autres, à ce qui a été une époque terrible de notre histoire. Comment peut-on en arriver là ?
Dans aucune commune de France métropolitaine et d’Outre-mer, un maire ne peut se passer de compétences extérieures. Aucune !
Je suis originaire d’un petit village d’Auvergne… Imagine-t-on que la secrétaire administrative soit recrutée uniquement dans cette commune, au motif qu’elle est de la commune, si elle n’a pas les compétences ? C’est inimaginable !
Mais c’est ça la richesse de notre pays. Ce sont les compétences que l’on trouve ailleurs. Imaginez-vous que je puisse, moi, fonctionner sans les compétences qui me viennent de Martinique, de Guadeloupe, de métropole et d’ici ? J’ai des gens compétents, ici, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.
Mais ils ont besoin des compétences de la Martinique, de la Guadeloupe et de la métropole… Je suis atterré !
Il faut que tout le monde reprenne raison. La République est en marche et elle doit avancer. Nous avons des dossiers importants à traiter avec la Collectivité, avec les représentants des quartiers, avec les syndicats, qui sont à la fois le Plan de Prévention des Risques, la préparation du plan d’aménagement et de développement de Saint-Martin. C’est l’avenir de ce territoire et des habitants, et également tout ce qui concerne, tout simplement, la vie démocratique. Nous sommes en démocratie et en république.
La démocratie est un système politique, la république est une vertu. Et bien, soyons tous vertueux et ayons conscience de ce qu’elle nous impose.
Donc j’appelle ceux qui, pour des raisons que je peux entendre, à reprendre le cours de la raison et de dire « bon, on se met autour de la table, on discute ». On ne met pas à mal des règles, qui sont des règles qui protègent le plus faible, comme le plus fort. Parce qu’on ne peut pas virer quelqu’un au motif qu’il vient de métropole et qu’il serait blanc, parce c’était ça quand même lorsque j’ai lu (le communiqué des trois syndicats NDLR). Comment en arrive-t-on là ?
Je lisais le document qui m’a été transmis par les élèves de l’école Lamartine. Comment Georges Richardson, un poilu qui est mort à Bazancourt, le 8 octobre 1918, nous comprendrait aujourd’hui ? Qui est mort pour la France… Il ne comprendrait pas. Il est mort pour la France, Georges Richardson, à Bazancourt dans la Marne. Je suis atterré… !
Il faut que chacune et chacun se mettent autour de la table, discutent en sérénité des sujets qui sont ceux sur lesquels le Président de la Collectivité, la Directrice générale des services, et les représentants des syndicats peuvent discuter. Mais on ne peut pas virer les gens au motif qu’ils sont métropolitains, au motif qu’ils sont blancs, et je ne sais quels autres motifs qui rendent les fréquentations et la société délétère.
J’aime Saint-Martin. J’aime les habitants de Saint-Martin. Je veux continuer à aimer Saint-Martin. C’est tout ce que j’ai à dire… ».